Il n’y a pas que ce que l’on porte à sa bouche qui nous nourrit. Le monde tout entier, en ses multiples formes visibles et invisibles, devient nourriture dès lors que l’on ouvre les yeux, les poumons, la peau, le cœur. Nous sommes nourris par des myriades de sources, parfois discrètes, souvent ignorées, mais toujours essentielles.
Il y a d’abord le souffle, prāṇa, cette force vitale qui nous traverse et nous relie à tout ce qui vit. Le souffle conscient, le souffle écouté, devient un nectar intérieur. Il nettoie, régénère, apaise. Chaque respiration sur le tapis ou dans la nature est une manière de se nourrir autrement, sans rien consommer, juste en recevant.
Il y a l’eau, fluide sacré. Elle ne fait pas que désaltérer : elle purifie, transporte la mémoire des éléments. L’eau bu doucement devient méditation. Celle qui coule sur le corps, celle que l’on entend dans un torrent ou que l’on sent dans l’air humide d’un matin d’été, nourrit nos sens et notre âme.
La lumière, elle aussi, est nourriture subtile. Une lumière douce du matin peut redonner confiance, comme un salut au soleil. Celle d’un crépuscule invite à l’introspection. La chaleur du feu, l’or du soleil, le miroitement de la lune : tout cela pénètre la peau, les os, les pensées. Il y a des jours où s’asseoir face à la lumière devient un rituel aussi puissant qu’une posture.
Nous sommes nourris par les rencontres, par les êtres lumineux. Les présences justes, celles qui écoutent , qui vibrent en silence, qui offrent un regard clair, sont des baumes. Elles nous rappellent à notre nature profonde, à notre capacité à aimer sans condition.
Les sons aussi deviennent nourriture. Le chant des oiseaux, le om vibré dans la gorge, le silence qui suit la dernière note d’un kirtan, ou le bruissement du vent pendant śavāsana. Tous ces sons parlent à une part ancienne de nous, celle qui comprend sans analyser.
Il y a aussi les lieux. Certains espaces nous accueillent comme un ventre maternel. Un rocher chaud sous le soleil, une salle simple où l’on pratique ensemble, une forêt dans laquelle on médite en marchant. Ces lieux nous restaurent. Ils nous rappellent que l’essentiel ne coûte rien et ne s’achète pas.
Et puis il y a le don. Car nourrir, c’est aussi se nourrir. Donner un geste tendre, une écoute attentive, un repas préparé en conscience. Dans chaque offrande sincère, le cœur se remplit.
Être vivant, c’est s’ouvrir à toutes ces nourritures. Les reconnaître, les honorer, les accueillir avec gratitude. C’est, en quelque sorte, une pratique de yoga à elle seule : une union avec le vivant.
Namaste.